Aujourd’hui, le Mexique célèbre son indépendance, et les rues résonnent au cri de « ¡Viva México! » Il y a 26 ans, ma mère se tenait sur la place principale de Mexico, le Zócalo, quatre jours avant ma naissance, pour participer à El Grito (cri de l’indépendance). J’aime m’imaginer que, dans son ventre, moi aussi, je criais « ¡Viva México! »
Mais une fois dans ce monde, crier « ¡Viva México! » est devenu plus compliqué pour moi. Pourquoi ? Parce que je me suis toujours sentie comme une imposteur.
Imposteur : prétendre être ce qu’on est pas.
Même si je suis née au Mexique, j’ai été rapidement déracinée lorsque ma famille a déménagé en Belgique. Je suis devenue une étrangère dans mon propre pays, déconnectée de cette terre où je suis née.
Durant mon enfance, mes contacts avec la culture mexicaine étaient rares. Ma mère faisait de son mieux pour maintenir un lien à travers des petites chansons, les tacos à la barbacoa achetés pour des occasions spéciales, et les piñatas lors de mes anniversaires. Gracias a Dios, comme on dit, ma mère m’a toujours parlé en espagnol. La langue est ainsi devenue ma plus grande connexion avec le Mexique, même si mon « petit accent » me trahit à chaque fois que je parle en espagnol.
À l’adolescence, mon premier copain, qui était latino, m’a reconnectée avec la culture latine. Grâce à lui, j’ai découvert la musique en espagnol, et peu à peu, ma playlist s’est remplie de chansons latines. Plus tard, j’ai commencé à prendre des cours de danse latine, une autre façon pour moi de me rapprocher de mes racines. C’est aussi à cette époque que je me suis intéressée à d’autres formes d’art mexicain, notamment à travers les peintures marquantes de Frida Kahlo.
En 2022, j’ai ressenti un besoin profond de découvrir ce pays que j’avais du mal à appeler « le mien ». J’ai alors voyagé au Mexique pendant deux mois. Ce voyage a été une révélation. J’ai été émerveillée par la richesse de la culture, les saveurs de la cuisine, les danses et les chants traditionnels. Mais, plus que tout, j’ai ressenti une immense fierté et un honneur d’avoir des origines mexicaines.
Depuis, j’ai décidé d’honorer mes racines en les intégrant davantage dans mon art. Mon nom d’artiste, Eva Rosa, n’a d’ailleurs pas été choisi au hasard, il résonne comme un clin d’œil à mes origines hispaniques.
De retour de ce voyage, j’ai enrichi mon répertoire avec des chansons traditionnelles mexicaines telles que La Llorona et Sabor a Mí. En ce moment, je travaille également sur mon tout premier EP. Dans les chansons que je compose, j’intègre non seulement l’espagnol, mais aussi des instruments et des rythmes latins. Ce projet me tient particulièrement à cœur, car je souhaite qu’il reflète mes diverses identités : mexicaines, québécoises, et belges. Un véritable cocktail culturel. À travers ma musique, j’aspire à toucher celles et ceux qui, comme moi, naviguent entre plusieurs cultures.
Enfin, l’identité visuelle d’un artiste est aussi importante, c’est pourquoi maintenant j’incorpore des touches de textiles mexicains dans mes tenues et mes performances. Chaque détail compte pour rendre hommage à cette culture qui fait partie de moi.
Crédit photo : Steven Berruyer
Je ne sais pas si je pourrais un jour dire « je suis mexicaine » sans aucune une hésitation. Mais aujourd’hui, je peux dire avec fierté : « je suis aussi mexicaine. » Et si je ne crie pas encore haut et fort « ¡Viva México! », du moins je vais vous le chanter.
Crédit photo : Steven Berruyer
Je serais ravie de lire vos propres réflexions identitaires, n’hésitez pas à les partager avec moi.
Crédit photo de couverture : Steven Berruyer